Résumé en français du rapport préparé par le Comité international de la Croix-Rouge en vue de la 33ème Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge : Le droit international humanitaire et les défis des conflits armés contemporains. Réengagement en faveur de la protection dans les conflits armés à l’occasion des 70 ans des Conventions de Genève (Partie II)
Mise en garde
La lecture du rapport proposée ci-dessous est celle de ses auteur.e.s, pas du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ; il ne s’agit pas d’une traduction officielle ni d’un compte-rendu exhaustif. Les auteur.e.s du billet ont voulu offrir un résumé du document à la communauté francophone, en attendant qu’une version officielle en français soit publiée par le CICR, et ainsi contribuer au débat qu’il a vocation à susciter. La version complète en anglais est disponible ici.
Ce billet de blogue est le deuxième volet du résumé, la première partie est disponible ici. Cette deuxième partie du résumé s’attardera sur les besoins de la population civile face à des conflits de plus en plus longs, sur les groupes armés non étatiques, sur la question du terrorisme, sur le climat et les conflits armés, et sur l’amélioration du respect du DIH
III- Les besoins de la population civile dans des conflits de plus en plus longs : questions choisies
Compte tenu du caractère multifacette et complexe des besoins de la population civile, le CICR estime que l’action en leur faveur se situe à 3 niveaux interconnectés : 1. La responsabilité par les parties au conflit de mettre en œuvre leurs obligations juridiques internationales, 2. Les destinataires de l’aide sont au premier chef les agents de leur propre protection, 3. L’action humanitaire doit prendre en considération les besoins, les perspectives et les préoccupations des destinataires de l’aide.
a) Les déplacés internes
En ce qui concerne les déplacés internes, le CICR constate d’abord qu’en raison de l’urbanisation de la guerre, les personnes déplacées se trouvent parfois dans les villes. Il rappelle ensuite que le droit international humanitaire (ci-après DIH) protège les personnes déplacées en tant que personnes civiles et que le droit international des droits humains complète cette protection, bien que l’articulation entre ces deux corpus juridiques puisse encore faire l’objet de clarification et d’évolution.
En abordant la question des camps, le rapport souligne leur caractère civil, qui les protège contre les attaques. Afin de leur conserver ce caractère, il est essentiel d’empêcher les membres des groupes armés d’y entrer. Cela peut toutefois entraver la liberté de mouvement des personnes. En outre, si le camp, étant infiltré de membres de groupes armés, devient un objectif militaire, il reste néanmoins soumis à toutes les règles relatives à la conduite des hostilités : distinction, proportionnalité et précaution. Le CICR rappelle par ailleurs que la présence de membres de groupes armés dans le camp ne fait pas ipso facto du camp, en tout ou en partie, un objectif militaire. À cet égard, le CICR réitère sa publication « aide-mémoire » conjointe avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés.
À propos ensuite des solutions durables, c’est-à-dire le retour volontaire, l’intégration locale ou la réinstallation, le CICR souligne qu’elles doivent être promues et soutenues par les autorités. À cet égard, il est mis en évidence que les restes de guerres sont un obstacle au retour des personnes déplacées dans les zones dans lesquelles ils se trouvent, en raison du risque qu’ils continuent de poser.
Enfin, le CICR souligne que le droit international des droits humains, à travers le droit à la liberté de mouvement et le droit de choisir sa résidence, complète le DIH et rappelle les textes pertinents en la matière : les Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur propre pays (1998) et la Convention de l'Union africaine sur la protection et l'assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala) (2009). Dans tous les cas, un meilleur respect du DIH permettrait d'éviter les violations que subissent les déplacés internes.
b) Les personnes en situation de handicap
En ce qui concerne les personnes en situation de handicap, le rapport met en avant le fait que les conflits armés intensifient les obstacles auxquels elles sont confrontées. Ces obstacles peuvent être physiques, de communication ou comportementaux. De plus, les personnes en situation de handicap peuvent souffrir de formes de discriminations intersectionnelles, en raison de leur âge ou de leur genre par exemple. De manière générale, ces personnes sont exposées à des risques plus grands. La prolongation des conflits armés exacerbe ces difficultés, lesquelles devraient être mieux prises en considération sur le court comme sur le long-terme. À cet égard, le rapport revient en longueur sur la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH, 2009), et en particulier son article 11 qui aborde les conflits armés. Revenant sur les critiques qui ont pu être formulées à l’égard du DIH, le CICR précise que ce dernier protège les personnes en situation de handicap en tant que personnes civiles, notamment lorsqu’elles se trouvent aux mains de l’ennemi, en détention, ou simplement parce qu’elles se trouvent sur un territoire contrôlé par l’adversaire. Il élabore ensuite sur les interactions entre le DIH et le droit international des droits humains, et souligne leur convergence. Plus encore, le rapport estime qu’« une lecture contemporaine du droit international humanitaire démontre plus de complémentarités que de contradictions entre le droit international humanitaire et le droit international des droits humains, en particulier en ce qui concerne la CDPH […] » (Rapport, p. 35). Ce faisant, le CICR souligne l’intérêt que présente le DIH en ce qu'il lie sans conteste les groupes armés, ce qui reste controversé en matière de droit international des droits humains. Il est ensuite fait état du rapport de 2017 sur la protection des personnes en situation de handicap du CICR à travers quelques exemples.
c) L’accès à l’éducation
Enfin, en ce qui concerne l’accès à l’éducation, le CICR commence par rappeler les entraves que les conflits armés y posent : étudiants, enseignants, bâtiments directement pris pour cibles ou subissant des dommages collatéraux, utilisation des infrastructures à des fins militaires, recrutement d’enfants ou violences sexuelles perpétrées dans ou aux abords des écoles, fermeture des établissements. Il souligne ensuite les dommages à long-terme que cela engendre et le fait que les communautés avec lesquelles il travaille insistent constamment sur la priorité à donner à la protection de l’éducation. Après avoir évoqué la stratégie 2018-2020 qu’il s’est fixé et le cadre de travail qu’il a adopté, le CICR revient ensuite sur deux aspects : la protection de l’éducation aux termes des règles relatives à la conduite des hostilités, et les obligations relatives à l’accès à l’éducation dans les conflits armés prolongés.
Pour ce qui est du premier aspect, le CICR rappelle que les écoliers et les personnels éducatifs sont des personnes civiles, et qu’ils sont protégés à ce titre, de même que les écoles ou autres installations dédiées à l’éducation sont normalement considérées comme des biens de caractère civil. À cet égard, le rapport souligne notamment l’importance de la définition de l’objectif militaire, lequel comporte deux composantes, dont l’une d’elles est la contribution effective à l’action militaire. Or, « si un établissement d'enseignement ne fait qu'apporter un soutien à une partie au conflit, il ne répondra pas à la définition de l’objectif militaire » (Rapport, p. 37).
Pour ce qui est des obligations relatives à l’accès à l’éducation dans les conflits armés prolongés, le rapport détaille les dispositions du DIH qui requièrent spécifiquement des parties au conflit qu’elles facilitent l’accès à l’éducation : l’article 50 para. 1 de la quatrième Convention de Genève en situation d’occupation et l’article 4 para. 3 a) du Protocole additionnel II pour les conflits armés non internationaux auxquels il s’applique.
IV- Le DIH et les groupes armés non étatiques
Le CICR rappelle d’abord la diversité des groupes armés impliqués dans des conflits armés contemporains, qui sont de plus en plus nombreux et présentent des caractéristiques disparates, du mieux organisé au moins bien structuré. Il en découle des défis inhérents en termes humanitaires et de protection, tels que les règles applicables à la détention par des groupes armés ou les difficultés liées à la négociation humanitaire. Au nombre des défis juridiques, le rapport traite trois aspects : l’applicabilité du DIH aux conflits impliquant de multiples groupes armés ; le régime juridique applicable aux personnes vivant dans des zones contrôlées par des groupes armés ; et les dilemmes pratiques et juridiques liés à la détention par des groupes armés.
a) Conflits armés et diversité des groupes armés
En ce qui concerne l’applicabilité du DIH aux conflits impliquant de multiples groupes armés, le CICR souligne d’abord les difficultés liées à l’application du DIH aux « alliances » ou aux « coalitions » que forment certains groupes armés entre eux. En effet, dans ces contextes, l’évaluation des critères d’intensité et d’organisation peut s’avérer complexe. Le CICR est d’avis que dans de telles situations, l’examen de l’intensité de la violence doit se faire collectivement « en considérant la somme des actions militaires entreprises par tous [les groupes] se battant ensemble » (Rapport, p. 41). Par ailleurs, lorsque des groupes viennent s’ajouter à un conflit armé non international pré-existant, le CICR estime que « la nature du soutien militaire apporté par le groupe supplémentaire jouera un rôle clé afin de déterminer si ce groupe se qualifie de partie à ce conflit armé » (Rapport, p. 41).
Le rapport se penche ensuite sur les difficultés liées au groupe armés qui se scindent. Dans cette hypothèse le CICR considère qu'il faut procéder à une évaluation séparée pour chaque groupe et distingue entre les cas dans lesquels les combats dans lesquels s'engage un nouveau groupe sont entièrement séparés des hostilités précédentes et ceux dans lesquels le nouveau groupe armé continue à se battre aux côtés du groupe auquel ses membres appartenaient jusqu'alors. Le CICR évoque enfin les cas dans lesquels un groupe initialement engagé dans les hostilités s’en désengage, alors que le nouveau groupe armé continue d’y participer, les questions non résolues étant dans cette hypothèse les plus nombreuses. À cet égard, le CICR encourage la poursuite de la réflexion à ce sujet.
b) Groupes armés et zones contrôlées
En ce qui concerne le régime juridique applicable aux personnes vivant dans des zones contrôlées par des groupes armés, le CICR rappelle qu’il n’existe pas de droit relatif à l’occupation dans les conflits armés non internationaux, et qu’il n’existe par conséquent pas de règles explicites qui règlementeraient les relations entre les groupes armés et les personnes vivant sous leur contrôle. Cela ne doit toutefois pas laisser penser qu’il n’existerait aucune restriction. Le DIH comporte des règles humanitaires essentielles protégeant les civils dans ces situations. Le CICR rappelle sa position, déjà exprimée en 2015 dans le rapport précédent, selon laquelle dans les situations de conflits prolongés le DIH continue de s’appliquer jusqu’à ce que les hostilités cessent et qu’il n’y ait plus de risque de résurgence de la violence, « ce qui est rarement le cas lorsque le contrôle du territoire continue de faire l’objet de contestation entre les belligérants » (Rapport, p. 42). Aussi, durant tout ce temps, la population civile reste sous l’empire des protections fondamentales offertes par le DIH.
Le CICR aborde également le débat relatif à l’applicabilité du droit international des droits humains aux groupes armés. Il constate que ce corpus contient un certain nombre de droits, en particulier économiques sociaux et culturels, plus élaborés que les protections offertes par le DIH. Si la question de savoir si ce droit lie les groupes armés reste controversée, le rapport relève toutefois un certain nombre d’occurrences dans lesquelles les États ont appelé les groupes armés contrôlant des territoires à respecter le droit international des droits humains en plus du DIH (principalement par le biais d’organes des Nations Unies). D’un point de vue pratique toutefois, il faut conserver à l’esprit que les groupes armés ne sont parfois pas en mesure de mettre en œuvre des obligations sophistiquées découlant du droit international des droits humains. Il en résulte que le CICR adopte une approche pragmatique reposant « sur la prémisse que les ‘responsabilités en matière de droits humains peuvent être reconnues de facto’ » lorsqu’un groupe armé exerce un contrôle stable sur un territoire donné et se comporte à l’image d’une autorité étatique.
c) Groupes armés et détention
Enfin, en ce qui concerne la détention par les groupes armés, le CICR constate que dans les pays dans lesquels il assure une présence, plus de 80 d’entre eux détiennent des personnes, et ce pour des raisons multiples (ennemis, personnes ayant commis des infractions de droit commun, otages, etc.). L’article 3 commun ne dit rien de la détention. Le Protocole additionnel II en revanche, tout comme le droit international humanitaire coutumier, exige que les parties au conflit respectent un certain nombre de garanties liées au traitement et aux procédures dont font l’objet les personnes détenues en relation avec le conflit. Il n’en demeure pas moins qu’un grand nombre de défis juridiques restent non résolus à ce jour. Le CICR en dresse une liste : connaissance et acceptation des règles par les groupes armés, ressources matérielles disponibles afin d’être en mesure de mettre ces règles en œuvre, procès équitable, garanties procédurales en matière d’internement, non refoulement etc. De ces défis, il résulte des besoins humanitaires significatifs.
V- Terrorisme, mesures contreterroristes et droit international humanitaire
Le CICR rappelle le fait que, depuis quelques années, les États ont été confrontés à une nouvelle menace émanant des groupes armés : les actes de terrorisme. Depuis, tant les États que les organisations internationales ont développé des mesures contreterroristes. Ces mesures ont eu pour effet de faire naître des défis liés à l’applicabilité du DIH, et ce à trois égards.
Le premier défi concerne l’application du DIH aux groupes armés désignés comme étant « terroristes ». Certains États refusent d’appliquer le DIH dans leurs opérations contreterroristes, et ce même si elles ont lieu dans le cadre d’un conflit armé. La raison qui explique un tel refus est le fait que ces États craignent que l’application de DIH et la reconnaissance de l’existence d’un conflit armé auraient pour effet de « légitimer les ‘terroristes’ » (Rapport, p. 46). Il existe également une tendance de la part des États à considérer comme étant un acte terroriste tout acte de violence émanant d’un groupe armé. Les États ont adopté un raisonnement selon lequel la menace terroriste relève d’un caractère exceptionnel et appelle donc une réponse exceptionnelle, autre que le DIH notamment.
Deuxièmement, les mesures antiterroristes sont une source de défis à l’égard de la mise en œuvre de l’action humanitaire. En effet, le CICR rappelle que la désignation de certains groupes armés comme étant des groupes « terroristes » implique une criminalisation de l’aide humanitaire, qui est alors perçue comme un soutien aux organisations ou individus « terroristes ». Or, le CICR met l’emphase sur le fait que cela est contraire à l’esprit-même du DIH.
Le troisième et dernier défi concerne le statut des « combattants » étrangers et de leurs familles. Ces derniers ne bénéficient pas d’un régime particulier en DIH. Les États ont pris plusieurs mesures face à une éventuelle menace émanant des combattants étrangers et de leurs familles, toutefois, le CICR rappelle que le DIH et les droits humains doivent s’appliquer et être respectés par ces mesures. De plus, dans ce Rapport, le CICR appelle à une vigilance particulière concernant les femmes et les enfants qui pourraient avoir été contraints de rejoindre un groupe armé non étatique et qui seraient victimes de trafic ou d’enrôlement involontaire.
VI- Climat, conflit armé et environnement naturel
La section VI du rapport offre une analyse des défis liés à la protection de l’environnement naturel en période de conflit armé. Elle s’articule essentiellement autour de trois points, à savoir les conséquences des conflits armés sur l’environnement naturel et le climat, les protections que le DIH offre à l’environnement naturel, et les Directives pour les manuels d’instructions militaires sur la protection de l’environnement en période de conflit armé (1994) qui font actuellement l’objet d’une révision par le CICR.
Le rapport met d’abord en évidence les multiples conséquences, tant directes qu’indirectes, des conflits armés sur l’environnement et le climat. Il soutient que les dommages infligés à l’environnement dans les conflits armés ont des répercussions négatives sur le climat et en conclut que les pays en proie aux conflits armés, ainsi que les populations victimes de ces conflits, sont particulièrement vulnérables à la dégradation de l’environnement et aux changements climatiques.
Le rapport relève ensuite que bien que la protection de l’environnement ne semble pas être une priorité pour les belligérants engagés sur le terrain des hostilités (Rapport p. 53), il importe de garder à l’esprit que le DIH énonce un ensemble de dispositions visant, certes non pas à empêcher que l’environnement ne subisse les effets des hostilités, mais à limiter les dommages dont il pourrait faire l’objet. À cet égard, le rapport rappelle, dans un premier temps, la protection directe que le DIH offre à l’environnement. Les règles spécifiques suivantes y sont notamment présentées : l’interdiction de recourir à des moyens ou méthodes de combat de nature à causer des dommages étendus, durables et graves à l’environnement, l’interdiction des attaques contre l’environnement à titre de représailles et l’interdiction d’utiliser des techniques de modification de l’environnement à des fins hostiles. D’autre part, le rapport présente la protection indirecte que certaines règles générales du DIH offrent à l’environnement. Ces règles englobent, entre autres, les principes régissant la conduite des hostilités, ainsi que les normes réglementant l’interdiction de certaines armes. Dans son analyse, le CICR identifie également quelques aspects de ces différentes règles ou interdictions qui peuvent faire l’objet d’interprétations divergentes et qui mériteraient de ce fait d’être clarifiées. Il en est ainsi de la définition de l’expression « environnement naturel », ou encore de l’interprétation des termes « étendus », « durables » et « graves » contenus dans l’une des interdictions énoncées ci-dessus.
Enfin, le rapport souligne que la réaffirmation, la clarification et la diffusion des règles relatives à la protection de l’environnement en période de conflit armé permettraient de limiter l’impact des conflits armés sur l’environnement naturel et le climat. C’est ce qui justifie notamment la révision des Directives pour les manuels d'instructions militaires sur la protection de l'environnement en période de conflit armé, récemment entreprise par le CICR. L’actualisation de ces Directives consiste à recenser et à clarifier l’ensemble des règles internationales qui assurent la protection de l’environnement en temps de conflit armé, ceci dans l’objectif de promouvoir une meilleure protection de l’environnement naturel dans les conflits armés contemporains.
VII- Améliorer le respect du droit international humanitaire
Le CICR souligne le fait que l’un des plus grands défis dans les conflits armés contemporains réside dans le non-respect du DIH. Concernant la question du respect du DIH, le rapport a dégagé quatre thèmes principaux que sont : les enquêtes pendant les conflits armés, contenir la violence dans la guerre, les « relations de soutien » dans les conflits armés et le respect du droit sur le champ de bataille.
Concernant les enquêtes pendant les conflits armés, elles représentent un moyen pour les parties au conflit d’améliorer le respect du DIH en ce qu’elles peuvent servir à démontrer qu’un État a violé le DIH, ou a contrario qu’il met tout en œuvre pour éviter et corriger les éventuelles violations.
Le CICR s’est également basé sur The Roots of Restraint in war, une étude de juin 2018 qui a identifié quatre points principaux afin d’analyser la manière dont les normes permettant de contenir la violence dans la guerre peuvent être intégrées dans les différents types de forces armées et de groupes armés. Premièrement, cette étude a démontré que plus les niveaux de formations en DIH étaient élevés, plus ces normes étaient adoptées par les combattants (étude menée sur deux armées étatiques : Les Philippines et l’armée Australienne). Deuxièmement, les règles informelles ont un impact fort sur la conduite des forces armées, même dans le cas de hiérarchies militaires strictes, et peuvent même remettre en cause des règles issues d’instructions formelles. Troisièmement, le fait de ne se focaliser que sur le droit a beaucoup moins d’effet que la combinaison du droit avec les valeurs qui l’entourent. Enfin, les entités externes peuvent influencer aussi bien les forces armées que les groupes armés non étatiques.
S’agissant des « relations de soutien » dans les conflits armés, le CICR rappelle que respecter le DIH inclut également l’obligation de ne pas encourager ni aider les violations du DIH, ainsi que d’inciter activement les parties au conflit à respecter le DIH. Il s’agit d’une obligation de moyen qui incombe aux États amenés à apporter leur soutien à l’une ou l’autre des parties au conflit.
Finalement, pour le DIH en action, c’est-à-dire sur les champs de bataille, le CICR revient sur l’impression générale que le DIH est plus souvent violé que respecté. Cette impression est notamment entretenue par la médiatisation des violations du DIH et a pour effet de susciter un questionnement sur l’impact du DIH et son effectivité. Or, cette médiatisation, et le doute qu’elle suscite, risquent de banaliser les violations du DIH, qui apparaissent comme récurrentes et donc plus acceptables. C’est pourquoi il faut encourager la mise en avant d’exemples de respect du DIH qui sont trop souvent oubliés au profit des violations.
VIII- Conclusion
En guise de conclusion, le CICR réitère que même la guerre a des limites, et qu’ancré dans l’expérience des États, le DIH permet « un équilibre prudent et pragmatique » (Rapport, p. 62) entre les nécessités militaires et l’humanité. Il réaffirme également que l’on doit toujours en revenir aux basiques et que toute interprétation ou développement du DIH devrait s’inscrire dans les protections qu’il prévoit et ne jamais les affaiblir.
Ce billet ne lie que la ou les personne(s) l’ayant écrit. Il ne peut entraîner la responsabilité de la Clinique de droit international pénal et humanitaire, de la Chaire de recherche du Canada sur la justice internationale et les droits fondamentaux, de la Faculté de droit, de l’Université Laval et de leur personnel respectif, ni des personnes qui l’ont révisé et édité. Il ne s’agit pas d’avis ou de conseil juridiques.
La publication de ce billet est en partie financée par Osons le DIH! et le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada.